Semaine du 26 novembre 2012
Album
(Music Fear Satan)
11/2012
Psyché
Un nom de groupe plutôt trompeur au premier abord, une volonté délibérée d’évoluer en dehors des formats, une méthode de composition pour le moins savonneuse… Il fallait que les musiciens du Réveil Des Tropiques soient foutrement doués pour réussir un tel coup d’éclat à l’heure de leur premier disque. Ça tombe bien, ils le sont. Bien assis sur leurs expériences au sein de One Second Riot, Ulan Bator, Object, ou Looking For John G (pour n’en citer que quelques-uns), les parisiens pondent le plus humblement du monde un double album surprenant, autant par son contenu que par la façon qu’il a de vous envouter.
Deux jours et trois nuits de totale improvisation, c’est le temps qu’il a fallu au quintet pour mettre sur pied cette heure et demi d’expérimentations psychédéliques et noise, krautrock et post rock, découpée en neuf titres oscillant entre trois minutes et le quart d’heure pour le plus grand plaisir des accrocs d’hallucinations musicales, époque Pink Floyd ou Mogwai. Mais ne fuyez pas: s’il en a tout l’air, Le Réveil Des Tropiques n’est en rien un projet barré et élitiste, mais plutôt dépourvu de prétention. La preuve, pour apprécier pleinement ce généreux album éponyme, suffit de déposer ses préjugés avant d’y entrer, de s’avachir dans le moelleux d’un canapé, placer le casque sur ses oreilles à haut volume, et laisser le disque dicter sa science, alterner son groove lors de moments d’intensité électrique jubilatoires (”Tenochtitlan”, “Sigiriya”) et d’accalmies ésotériques aussi venimeuses que régénérantes (”Homs”), souvent dans un même morceau (”Jerusalem”, “Kinshasa”, le magnifique “Antibes”).
Alors, bien rangé derrière une basse qui semble assumer pleinement le leadership, chaque musicien, à la fois si seul et au service du collectif, contribue autant qu’un autre à l’impressionnante cohérence de ces improvisations hallucinantes à tous les sens du terme, celles qui – chez d’autres – auraient eu toutes les chances de verser dans l’inaudible. Dès lors, l’ultime note de “Anthemusa” nous laisse seuls, en pleine descente, avec un doute aussi flippant qu’excitant: qu’il improvise de nouveau ou décide de composer plus traditionnellement, le Réveil des Tropiques pourrait-il vraiment mieux faire? On ne s’est pas souvent posé la question en 2012…
Source et plus d’infos : http://www.mowno.com/features-disques/le-reveil-des-tropiques-le-reveil-des-tropiques/#more-41787